MEMOIRES DU MATRICULE 53177
Prisonnier de guerre au Stalag 2D à Stargard (Poméranie)
1940 - 1945

                                          

ACCUEIL
SERVICES
1940
1940
La capture
1940
Travail en kommando
1941
1942
L'évasion
1942
Repris
1942
En cellule
1942
Retour au kommando
1942
Ils l'ont dans l'cul
Chant
1943
1943
Vie quotidienne
1943
Petite revanche
1943
Histoires de femmes
1943
Nourriture
1943
Travailler plus
1944
La Libération approche
1945
Les russes approchent
1945
Sur le chemin du retour
1945
Une brouette providentielle
1945
Sur la route
1945
La déroute
1945
Les russes arrivent
1945
Libre mais loin
1945
Les américains
1945
Le train de la liberté
19 Ko
Trajet retour
Carte 48 Ko
Les tarots
Monnaie de camp
Ecrire à l'auteur

 

1943 - LA VIE QUOTIDIENNE EST DIFFICILE...
mais on s'arrange.

Si mes services n’avaient pas été pleinement appréciés par le sieur Tangue, il est fort probable que dans les premiers mois de cette année, j’aurais été embarqué pour le « Kommando » disciplinaire de Vudargue (« Kommando » spécialisé, hiver comme été, dans le drainage de marécages… pas de bottes, bien entendu, sinon trouées… ! Des sabots aux pieds … !)

En effet, à la suite d’une altercation très vive avec le Maire (le sieur Neumann, « Baweurfurher ») à propos de photographies de famille distraites par des gosses de notre courrier – il faut dire qu’en l’absence de notre gardien civil Albert, notre courrier était purement et simplement déposé sur le seuil de la porte par le facteur – Neumann se jura de me faire payer cher cette insubordination !

Quoi de mieux que de m’expédier au « Kommando » disciplinaire ?

Toutefois, il ne voulait pas prendre cette décision sans en parler à mon patron (ancien Maire – son grand ami). Stangue ne fut pas d’accord car me connaissant, il savait ce qu’il tenait, alors que, devant être automatiquement remplacé par un prisonnier extrait de Vudargue, il ne pouvait savoir sur quel « numéro » extraordinaire il risquait de tomber.

C’est bien pourquoi, un beau matin, à ma grande surprise, mon matricule ne fut pas cité lorsque le gardien militaire de Gramnitzfeld désigna deux camarades pour Vudargue. L’un était le coéquipier de Paul Hébert, lequel avait trop fait comprendre à Neumann son penchant pour un succès final de la Russie, l’autre avait été pistonné par sa patronne qui le trouvait par trop gênant et peut-être compromettant !!

Neumann, ce gros profiteur n’était pas toujours régulier avec ses deux « esclaves » en particulier avec l’ami Bouche qui, trop pondéré, se permettait, en général calmement, de dire ce qu’il pensait à ce gros nazi !

Au cours de l’année se situe une histoire que je crois devoir relater, bien que ne me concernant pas personnellement, comme susceptible de montrer qu’en Allemagne, il existait quand même, dans ce contexte de guerre, quelques éléments ayant conservé un sens humain et anti-nazi, d’un esprit et d’une intelligence digne d’être enviés par nous autres Français. Je dirais tout de suite qu’il s’agit de notre gardien militaire du moment.

Un certain jour d’automne, le gros travail à la ferme Neumann consistait à mener le fumier dans les champs. Cela durait d’ailleurs depuis plus d’une semaine. Bien entendu le patron s’était chargé du charroi, tâche peu fatigante ! Bouche chargeait les chariots à la ferme et l’autre camarade épandait le fumier dans les champs.

Neumann avait combiné le travail de manière que, de retour avec un chariot vide, Bouche ait à peine terminé le nouveau chargement (pas de temps perdu et c’est une façon de talonner l’esclave) !

La nuit étant venue et les soins de fin de journée restant à donner au bétail, Bouche refusa de charger un dernier chariot qui, ainsi, aurait été prêt pour le lendemain matin. Coup de gueule du « chef » qui crû bien faire en sortant un pistolet !

Sans s’énerver, Bouche quitta la cour de ferme et partit rendre compte de cette menace à notre gardien militaire à Gramntzfeld.

Celui-ci comprit tout de suite qu’il lui fallait ménager la chèvre et le chou, (il ne faut pas oublier que, compte tenu de sa position dans les S. A. , Neumann, non satisfait du gardien, aurait-pu le faire muter ou encore le faire partir pour le front russe. On commençait à vider les fonds de tiroirs !! ) et propose à Bouche le stratagème suivant : « Je vais te reconduire manu-militari à Konstantinopel où tu devras tout de même consentir à charger ce chariot. Mais attention… Il ne faudra y consentir que lorsque j’aurai dégainé mon revolver avec quelques ‘Lors – Raust’. Neumann sera ainsi très satisfait. Quand à toi, je te garantis que ce sera véritablement le dernier chariot car tu ne travailleras plus chez ce patron !! »

Tout se passa ainsi, et le camarade Bouche nous quitta pour être placé dans une petite ferme (la patronne, la fille, une vache, deux cochons et un cheval) où il fit office de patron ! C’est notre gardien qui avait arrangé cela auprès de la compagnie à Jacobhagen.

Au cours de cette année, l’économie de guerre était de plus en plus stricte et les civils commençaient à manquer un peu de tout, encore qu’à la campagne la vie soit plus facile qu’en ville. Le prisonnier français avec ses sardines, son chocolat, etc., était souvent mieux servi que le civil allemand avec ses marks. C’est ainsi par exemple que le dentiste de Jacobshagen me fit quelques plombages sérieux en utilisant des produits d’avant guerre qu’il réservaient aux Français !

Suite


Lien

Prisonnier de Guerre 40-45    
Stalag XIIIA et XIIID avec des documents officiels d’époque

olijuseb.free.fr/passeport.htm -

Lettre d'un prisonnier permissionnaire
Lettre d'un prisonnier permissionnaire à son copain resté en Allemagne
olijuseb.free.fr/courrier.htm