MEMOIRES DU MATRICULE 53177
Prisonnier de guerre au Stalag 2D à Stargard (Poméranie)
1940 - 1945

                                          

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1945 - LES AMERICAINS

Nous traversons donc la ville au trot, nous ne passons certainement pas inaperçus dans toute ces rues pavées, mais nous ne faisons pas plus de bruit que tous les chars qui nous côtoient ! Nous arrivons en vue de l’Elbe vers les 17 heures.

Ce fut une surprise désagréable pour nous tous lorsque, gravissant le talus (voir croquis page suivante) nous découvrons une véritable mer humaine sur le très long et large quai en contre-bas, quai sur lequel est aménagé l’embarcadère du bac.

Image tirée du manuscrit original

Nous abandonnons voiture et chevaux ainsi que le chargement (sauf nos affaires personnelles), et nous descendons sur le quai où se trouvent mêlés plus de dix milles prisonniers français, travailleurs du STO français, des prisonniers italiens, russes, et même de nombreuses françaises !! et d’autres femmes étrangères (polonaises, roumaines, ukrainiennes…). Un officier français annonce que seuls les prisonniers français pourront accéder au bac. Aux intéressés à faire leur police pour qu’il en soit ainsi, sinon les traversées seront arrêtées. Notons qu’à l’aide de barques, certains ont essayé de gagner l’autre rive, mais ils ne manquaient pas d’être aussitôt repérés par les Américains qui, docilement, les ramenaient à leur point de départ, il y avait lieu de respecter la convention passée entre les Américains et les Russes. Ainsi donc, à la force du poignet, plus précisément des poings, un carré de prisonniers français se forme petit à petit, carré protégé par les hommes du pourtour se tenant par le main et formant ainsi une chaîne ininterrompue qu’aucun ne pouvait traverser sans montrer patte blanche !

C’est ainsi que le bac accosta en face de ce carré, sur la rive sauvage, car il ne put, comme habituellement, utiliser l’embarcadère non situé en face de notre « carré ».

Il fallait donc viser juste pour monter à bord et beaucoup de ceux se trouvant sur les cotés tombèrent à l’eau et burent une bonne tasse !

Il était bien 19 heures lorsqu’on put atteindre la rive gauche et respirer un peu… car il faut dire qu’il faisait ce jour là une chaleur insupportable dans cette mêlée compacte exposée en plein soleil sur ce fameux quai.

Nous étions donc enfin chez les Américains en cette fin de journée du 9 mai. Quel contraste ! De ce coté c’est le calme. Nous sommes dans un immense marécage, couchés sous des buissons… lorsqu’un Américain nous avise qu’un train, oui un train !! est à notre disposition dans la gare toute proche en traversant les marais.

La vase et l’eau jusqu’à mi-jambes ne devaient pas nous empêcher d’atteindre le talus de la voie ferrée en un temps record. Mais, hélas, ce fut pour apercevoir au loin le train partir… l’Américain avait dit vrai… Mais nous avions perdu trop de temps. Nous atteignons la gare où nous pourrons être renseigner par un cheminot qui binait tranquillement ses haricots ! D’après lui, le train devait revenir le lendemain matin vers les huit heures.

Il ne restait plus qu’à trouver un refuge pour la nuit, et cela aussi près que possible de la gare. C’est pourquoi nous n’avons pas cherché mieux que le fenil d’une petite ferme située à une centaine de mètres. C’était d’ailleurs la propriété du patron d’un aimable Polonais qui nous donna beaucoup de renseignements sur la situation générale et plus particulièrement sur les dispositions prises par les Américains dans ce secteur pour le rapatriement des Français. Nous n’étions pas seuls à notre arrivée et toute la nuit ce fut une véritable fourmilière car le bac, qui s’était arrêté en fin de soirée s’était remis à fonctionner au cours de la nuit. Des gens (hommes et femmes) arrivaient sans cesse, s’éclairant avec des bougies au milieu de tout ce foin. Mais, contre toute logique, la nuit se passa sans pouvoir dormir, bien sûr, mais sans être simplement rôtis !

Dès six heures ce 10 mai, nous étions sur pieds et bien avant huit heures nous attendions déjà sur le quai de la gare. Neuf heures : rien. Dix heures rien. Alors cette foule qui, jusqu’alors n’avait fait que croître, se fit de moins en moins dense, car beaucoup commencèrent à douter de l’arrivée de ce train et préférèrent reprendre la route avec des petits chariots à bras, des brouettes ou tout simplement sacs au dos.

Notre équipe fut l’une de celles qui, fort heureusement, persévérèrent.

Vers onze heures, en effet, un coup de sifflet se fit entendre au loin ! C’était bien notre train qui, quelques minutes après, entrait en gare.

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Seconde guerre mondiale 1939-1945 Albert Pognant 
Bonne bibliographie et photos
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